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TEST · REVIEW · CRITIQUECONSOLE NINTENDO ENTERTAINMENT SYSTEM (8-bit)


Quatre héros prisonniers pour l'éternité de donjons meurtriers. Une tragédie ludique !

Gauntlet II

Gauntlet II

 

 NES

Concepteur:
Atari

Développeur:
Mindscape

Editeur:
Mindscape
Genre:
Action / Aventure

Joueurs:
1-4P

Dates de sortie
11.1990 USA
04.1991 Europe
25.04.1991 Suède
sans Difficulté:

72%Graphismes
78%Animation
84%Son
95%Jouabilité
80%Durée de vie

80%80%
Trucs et astuces

Déblocage:

Au bout de 2 minutes 25 secondes d'immobilité, toutes les portes s'ouvrent; 30 secondes plus tard, toujours sans avoir bougé, les murs se changent en sortie.

Un lourd gantelet de fer incrusté de pierres précieuses surgit des ténèbres et vous saisit à la gorge. Une main se glisse hors du gantelet, pourtant celui-ci continue toujours de vous broyer le cou. La main a le pouce coupé, il ne lui reste plus que quatre doigts. Quatre. Pourquoi le chiffre attire autant votre attention ? Du coin de l'oeil, vous apercevez un guerrier avec des oreilles d'elfe et un chapeau de sorcier qui fredonne la Chevauchée des Walkyries.

Vous commencez à suffoquer, le gantelet ne lâche pas prise. La pièce, petite et carrée, s'est soudain faiblement éclairée. Dans un coin, un coffre à trésor, dans un autre, une pile d'ossements. Les poumons vous brûlent. Vous n'en pouvez plus, vous arrachez votre chemise d'une main, l'autre toujours posée sur le gantelet. Le mot "IT" est tatoué sur votre poitrine. Qu'est-ce que cela veut dire ? Tout d'un coup les murs se volatisent, l'espace noir est couvert du mot "exit" se répétant à l'infini.

Vous vous réveillez en poussant un cri étouffé, car votre propre main vous enserre la gorge.

Votre femme se retourne, à demi-endormie.
"Hmm, qu'est-ce qu'il y a chéri ?"
Ce n'était qu'un mauvais rêve. Le front encore humide vous vous recouchez.
"Ce n'est rien. Juste un souvenir d'enfance."

Gauntlet II sur NES a en effet de quoi traumatiser une génération de joueurs, et pas seulement à cause de ses couleurs vives et de ses légions de monstres de seize pixels de haut. Avec ses niveaux qui se construisent au hasard et se répètent à l'infini, c'était comme de se retrouver prisonnier de Donjons et Dragons en version lilliputienne et psychédélique. Il en aura influencé des jeux vidéo ce jeu de rôles, même s'il faut avouer que c'est souvent les deux premières minutes qui subissent l'influence principale, à savoir l'écran de sélection des personnages.

Il y en a un aussi dans Gauntlet II, vous pouvez choisir d'incarner un guerrier, une valkyrie (sans doute parce qu'il n'y a pas de féminin pour guerrier en anglais), un sorcier, ou un elfe. Les différences entre eux sont réelles et concernent des caractéristiques qui affectent directement le gameplay: défense, attaque, vitesse, magie, poids. L'écran titre ressemble à une couverture de Mad Magazine, les quatre bonhommes ont la même tête, même la femme avec ses seins plats. Gauntlet II a une singularité qui vaut son pesant d'or: on peut jouer jusqu'à quatre, même sur NES, à condition de posséder le Four Score, le quadripleur de prises manettes.

Ce n'est pas loin d'être l'argument de vente principal, et, de nos jours, l'une des rares raisons de ressortir un jeu à la face si ridée qu'elle ressemble à un 45 tours. Il est taillé pour tirer parti de son mode multijoueurs, les petits graphismes assez laids, les couleurs bien définies, ne sont là que pour vous y aider à y voir dans le fouillis de la mêlée. Seul, c'est un titre qu'il était risqué d'acheter, voire même qu'il était conseillé d'éviter pour ne pas avoir l'impression de se faire rouler. Quel intérêt en effet de jouer à une aventure qui n'en est pas vraiment une, cyclique comme une routine informatique ? Peut-on y prendre du plaisir et si oui, où celui-ci se trouve-t-il ?

A plusieurs, c'est une tout autre affaire, pas celle du siècle, mais c'est déjà bien plus drôle. Tout cela préfigure Final Fantasy Crystal Chronicles, n'est-ce pas ? Assez ennuyeux seul (quoique lui soit d'une platitude mortelle pour un RPG), plus attrayant avec des amis sans pour autant casser la baraque, avec de toute évidence cette intention multijoueurs dès le départ. Gauntlet II est un peu son grand-père, même s'il a suffisamment de descendants dans sa propre branche pour ne pas avoir besoin d'adopter un petit fils.

Assez divagué ! les faits maintenant. Une fois le ou les personnages choisis, on vous expédie dans un niveau. Les cinq premiers sont toujours les mêmes avec de menues altérations, tous les suivants sont construits aléatoirement quoique dotés d'éléments récurrents. Ils sont courts et le but est toujours le même, atteindre la sortie; parfois cela nécessite de trouver des clefs ou de marcher sur des dalles pour lever certaines barrières. La plupart des monstres sont générés par des blocs destructibles; c'est un jeu au design très carré, de la même génération que Solomon's Key. Il y a des options à ramasser, dont notamment son anagramme, "potions" (seules capables de détruire Death, un ennemi fatiguant), mais aussi des trucs qui ne servent finalement à rien, comme les trésors.

Rien n'a vraiment de valeur dans Gauntlet II et c'est bien tout le problème. On ne joue pas pour arriver à la fin puisqu'il n'y en a pas. L'absence de tableau de high-score sous-entend que jouer pour les points n'a guère plus d'intérêt. On ne joue pas non plus pour la difficulté individuelle de chaque salle, trop simple, et qui, de toute façon, peut se résoudre d'elle même, quand, au bout de deux minutes d'attente, les portent s'ouvrent puis les murs se changent en sortie. Pratique si l'on se retrouve coincé mais qui relève autrement de l'antijeu. Quant à la difficulté générale, pourvu que vous ayez une seconde manette, vous êtes comme immortel, même en jouant seul. Tout ce que vous avez à faire est de prendre le contrôle du second joueur quand le premier meurt, et vice versa quand vient son tour de succomber.

Alors c'est peut-être un hack 'n' slash ("tranche et coupe"), c'est peut-être même le père fondateur de ce genre très mineur qui vu d'ici ressemble plutôt à un shoot bunny's poops 'n' walk ("tire des crottes de lapin et marche"), mais c'est malgré tout un jeu d'aventure. Et un jeu d'aventure sans but, qui se contente de tourner en rond comme un chien chassant sa queue, c'est aussi futile, démoralisant et inintéressant que d'écrire un livre dont on brûle les pages au fur et à mesure.

C'est old school diront les mordus qui s'amusent depuis quarante ans sur la même cartouche. Oui, c'est très old school, comme le gramophone et le point de croix, mais est-ce encore bon ? On peut se le demander, surtout que Midway essaye vainement de ressusciter la série périodiquement avec des Dark Legacy et autre Seven Sorrow qui ne volent pas très haut. Gauntlet, c'est une série B des jeux vidéo, et, comme pour les films, elle a des fans dévoués, ne serait-ce que par le fait qu'elle est une série B.

Finalement on joue moins à Gauntlet II comme on jouerait à un jeu que comme on jouerait avec un jouet. Le jeu a une finalité, mais pas le jouet. Et Gauntlet, c'est un peu ça, des cohortes de monstres à zigouiller, des monceaux de trésors à empocher, des pouvoirs bizarres et dérisoires à utiliser (la téléportation casse-blocs !), une infinité de labyrinthes à traverser, c'est comme de se retrouver sur le tapis de sa chambre avec des histoires plein la tête. On arrête quand on en a marre, pas autrement, mais avant cela on peut y prendre du plaisir. Plaisir d'autant plus grand qu'on zigouille, qu'on empoche, qu'on utilise et qu'on traverse en bonne compagnie. A plusieurs, on peut se donner des ordres mutuellement, se pousser, s'organiser, même si cela est fondamentalement inutile c'est une joie qu'on ne se refuse pas.

Parfois, un niveau est précédé d'une règle. Cela vient un peu compliquer les choses et surtout casser une routine qui a tendance à s'installer rapidement. Parmi ces règles, il y en a qui déplacent la sortie, d'autres qui rendent les murs invisibles ou votre groupe vulnérable à ses propres tirs. Il existe aussi des salles secrètes en temps limité qui s'obtiennent on ne sait pas comment, certaines sont remplies de trésors et dépourvues d'ennemis, d'autres sont normales, de dimensions moyennes mais doivent se jouer seul. Et puis il y a le dragon, c'est l'ennemi le plus fort du jeu mais on peut difficilement le qualifier de boss; son apparition semble tout aussi aléatoire que le reste, et il n'est guère plus grand.

Malgré le peu qu'on en a dit jusqu'ici, c'est assez pourtant pour se faire une mauvaise idée du graphisme. Il a des qualités tout de même, comme de produire de beaux screenshots, ce qui ne fera pas beaucoup d'heureux si ce n'est parmi les lecteurs assidus de 1UP, car on sait que cela passe souvent mieux en image que sur l'écran de télévision, la preuve par Bubble Bobble. Mais cet atout en réalité en cache d'autres. Si les screenshots sont agréables à l'oeil c'est parce que dans l'ensemble les couleurs sont bien choisies et les formes claires, en sorte que le graphisme est lisible. Ce n'était pas gagné d'avance dans un jeu où les niveaux se façonnent au gré du hasard.

Tout particulièrement intéressant est le son de Gauntlet II. Il n'y a aucune musique, ce qui le distingue de la plupart de ses pairs. Moyennement réussis et pas si nombreux, les bruitages ne sont pas non plus une occasion pour lui de briller. Les attaques paralysantes et le cri strident de l'alarme, qui avertit trop tôt que vous manquez d'énergie, sont si irritants qu'ils seraient plutôt une raison de les haïr. Ce qui rend le jeu unique est le nombre impressionnant de digitalisations vocales. Un commentateur décrit les moments importants de l'action, en désignant les personnages par leur aspect (yellow wizard, red warrior), quand par exemple les vies sont basses ou qu'untel vient de détruire de la nourriture. Il y a aussi des cris que l'on entend en recevant un projectile; quand tout le monde crie, ça ressemble à un film pour adultes. Ce n'est pas le seul titre de la console à faire usage de voix, il y a par exemple Gradius II ou The Adventures of Bayou Billy, mais c'est certainement l'un des plus volubiles, si ce n'est le plus volubile.

Un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout... si Gauntlet II était une fleur, ce serait une marguerite et les joueurs ses pétales. L'absence de but et de difficulté sont une bonne raison pour ne pas du tout accrocher, le manque de variété du graphisme et la lassitude en solo encore une autre pour ne pas l'aimer. Cependant, si l'on dispose du matériel nécessaire (le Four Score, quatre manettes et, erm, des copains), on peut découvrir le jeu sous un angle totalement différent. Même à deux ou à trois joueurs la convivialité est déjà de mise. Certains n'hésitent pas à le proclamer meilleur jeu multijoueurs de la NES. Que ce soit vrai ou non, Gauntlet II a au moins l'avantage considérable dans la catégorie restreinte des jeux à 4 sur NES de ne pas être un jeu de sports, ce que la plupart des autres sont.

Et puis surtout, il est possible de s'amuser avec le principe du jeu tel quel, aussi relâché soit-il, de découvrir les qualités de ses défauts apparents. Ce n'est pas un jeu dans lequel on trouve du génie, et il aurait plus sa place dans le coffre à jouets que sur l'étagère, mais il produit facilement quelques heures de plaisir quand l'envie nous prend.

le 23 novembre 2007
par sanjuro



Jeu testé en version européenne
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