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TEST · REVIEW · CRITIQUECONSOLE SUPER NINTENDO (16-bit)


Dirk the Daring, Dirk l'Audacieux, dans un jeu audacieusement stupide.

Dragon's Lair

Dragon's Lair

ドラゴンズマジック (Dragon's Magic)
Suppléments:

Plan du Château

 Super Nintendo

Développeur:
Motivetime

Editeur:
Elite
Genre:
Action

Joueurs:
1P

Dates de sortie
10.1992 Europe
02.1993 USA
25.06.1993 Japon
horrible Difficulté:

70%Graphismes
78%Animation
87%Son
65%Jouabilité
72%Durée de vie

43%43%
Trucs et astuces

Mots de passe:

Niveau 2:
2A 4B 6D 7C

Niveau 3:
3B 5C 7D 8A

Niveau 4:
2C 3D 6A 8B

Dragon:
1C 2D 3B 8A

Que trouve-t-on dans l'antre d'un dragon ? Des trésors, beaucoup de trésors. Des chauves-souris aussi, suspendues entre les stalactites mais loin des trésors car ceux-ci brillent trop. Sans doute quelques squelettes tenant des épées brisées, et peut-être même une princesse, elle avec toute sa chair aux bons endroits. Non, il y a forcément une princesse ! Allongée, tremblante, sur une litière de paille près d'un monticule rouge qui se soulève par intervalles. Large et féroce, les naseaux fumants et la gorge enflammée, c'est le dragon que l'on est certain de trouver. Il dort cependant, car la plupart du temps, il attend. Il attend l'aventurier assez brave qui s'aventurera dans son antre pour la princesse ou les trésors, ou les deux s'il est ambitieux.

Mais le dragon est ancien et sage, il sait que l'aventurier est plus stupide que brave pour venir chez lui, et qu'il n'a pas grand chose à craindre si ce n'est de recevoir une petite piqûre au flan. Alors, en attendant, il sommeille. Et, au milieu de son or scintillant et près de la princesse terrorisée qui sent bon les fleurs, il rêve de ses victoires prochaines sur une humanité médiocre. Les squelettes lui répondent de leur sourire éternel.

Dans Dragon's Lair, l'aventurier se nomme Dirk. Serait-ce un signe avant-coureur de stupidité ? Le dragon s'appelant Singe et la princesse Daphné, on serait en tous cas tenté de penser que les auteurs n'ont aucun talent onomastique. La faute n'en revient pas à Elite ni à Konami - qui distribue le jeu au Japon, on se demande pourquoi avoir pris cette peine - mais aux créateurs du jeu original. Car, comme tout joueur digne de ce nom ne manque pas de le savoir, Dragon's Lair a des antécédents. Lancé dans les salles d'arcades américaines en 1983, ce fut l'un des premiers jeux à utiliser le laserdisc, qui permettait d'afficher de la vidéo. Grâce à son graphisme à des années lumière des jeux de l'époque, il devint rapidement une source d'attraction et un succès à plusieurs dizaines de millions de dollars.

Même s'il y a eu une suite, huit ans plus tard, avec un sorcier remplaçant le dragon, c'est toujours le premier qui est régurgité aux vieux joueurs prêts à céder à leurs impulsions nostalgiques. Et donc, un peu comme Pac-Man, triomphe archaïque qui n'a cessé depuis de se voir décliner sous toutes formes de jeux plus vite oubliés les uns que les autres, la marque Dragon's Lair continue de sortir des remakes et des rééditions périodiquement, comme un barde récitant depuis un quart de siècle la chanson de geste du sire Dirk. Seulement, le succès initial reposant surtout sur le choc du laserdisc et les séquences d'animation de Don Bluth, réalisateur de renom (Brisbi et le Secret de NIMH, Fievel, Anastasia...), le répéter était une mission perdue d'avance. En tant que pur jeu, Dragon's Lair n'a jamais eu beaucoup d'admirateurs. S'il est l'un des précurseurs du laserdic, il est aussi celui d'une jouabilité désastreuse commune à tous ces films interactifs passant pour des jeux vidéo, et dont des échecs retentissants comme le Mega-CD ou le CDi furent friands.

L'ironie du sort a voulu que les tentatives de faire de vrais jeux à partir de l'univers de Dragon's Lair se révèlent elles aussi souvent désastreuses, ce qui nous amène justement à cette version pour la Super Nintendo. L'histoire est cette fois-ci transposée dans un jeu d'action assez classique, où l'on dirige le sprite longiligne de Dirk explorant le château à la recherche de Daphné. Les designers ont repris beaucoup d'éléments du jeu d'arcade, en redessinant la plupart des ennemis et même des mimiques de notre chevalier maladroit telles que son coup d'épée et ses gaffes. C'est le moins qu'auraient pu espérer ses admirateurs, à qui ce jeu s'adresse en priorité de toute évidence. Malheureusement, ce genre de choix a aussi le défaut de l'isoler du reste du public; les couleurs, le style des personnages sont tellement marqués dessin animé et début des années 80 que cela ne passe pas très bien.

C'est aussi l'indication d'une déficience du graphisme plus profonde. Les environnements ne sont guère pittoresques, les arrières-plans sont monotones, en particulier ces larges dégradés d'une linéarité formelle affreuse que l'on retrouve un peu partout. Quand bien même le décor est massif et assez détaillé, lui aussi respire l'ennui et ressemble plus à la charpente d'un décor de cinéma qu'à sa face peinte. On aurait pu tout de même s'en accomoder si une faute décisive n'avait pas été commise: nous ressasser ces décors du début jusqu'à la fin. En effet, le jeu a beau compté 20 niveaux et 4 boss, on traverse toujours les mêmes endroits, sachant qu'il y a 5 niveaux se déroulant sur la muraille, autant dans des espèces de marécage et autant dans le château, où, avec ses grosses pierres et ses ouvertures, on a l'impression ici comme ailleurs d'être toujours dans le même niveau plutôt que dans des salles différentes. On est bien loin du château et des terres de Super Castlevania IV.

Des cinq niveaux restants, trois se jouent dans le noir entouré d'un halo façon A Link to the Past et deux en marchant à l'aveuglette derrière les décors, cette fois-ci façon Super Mario World (château de Bowser, troisième porte). Et devinez quoi ? Ils se jouent dans les mêmes trois types de décor que nous évoquions. Donc, s'il y a bien vingt niveaux, Dragon Lair n'a en revanche que trois environnements. Serait-on avare de graphismes chez Elite ? En parlant de Super Mario World, la carte du château en est quelque peu inspirée. Certains niveaux ont deux sorties, une fausse, toujours bien en vue, qui vous conduit dans un cul-de-sac, et une vraie, qu'il faut parfois chercher puisque ce n'est jamais qu'un bloc avec "exit" gravé dessus. Chez Mario, cette idée de sorties multiples est amusante, ici, elle est vexante, pour la bonne raison que les niveaux sont si énervants que quand on en sort enfin, on espère ne plus avoir à y revenir.

Malgré leur nombre restreint, les musiques sont l'une des rares réussites. Celle des fortifications est probablement la meilleure, on regrettera juste un peu qu'elle ait fini dans un tel jeu. Il y a quatre modes de difficulté, qui se contentent de réduire le nombre de points d'énergie que vous possédez; il faut être suicidaire pour essayer autre chose que le mode facile. Ce n'est pourtant pas un de ces jeux qui moulent votre patience comme du café, avec des passages impossibles et des ennemis psychopathes, c'est avant tout une question de mauvaise jouabilité et d'absence de savoir-faire. Motivetime a des idées tellement débiles (à l'image du système de mots de passe sur lequel nous reviendrons) que l'on a l'impression d'avoir affaire à des imbéciles. Ils faisaient quoi avant de faire des jeux vidéo, de la manutention dans une usine de saucisses ? Il y a de nombreux exemples de leur manque de jugement, que nous allons nous faire une joie de vous citer pour justifier la note.

Commençons par la tête de dragon, on ne peut pas la rater puisqu'elle apparaît dans chaque niveau. Au bout de quelques secondes, tout le temps, inlassablement, cette tête verte fumante se met à vous pourchasser. Il faut s'en débarrasser à chaque fois ou se résoudre à prendre des dommages si la situation ne le permet pas. Dirk a bien entendu une épée. Il la manie comme un club de golf, c'est à dire avec un mouvement latéral par le bas, ce qui est non seulement une drôle de façon de se battre mais réduit son champ d'action. Il peut aussi ramasser des armes de jet, hachettes, couteaux, ou shurikens. On se demande ce que des shurikens viennent faire là-dedans, mais dès qu'on s'en sert, on est trop occupé à jurer pour se poser encore la question. Car voyez-vous, comble de la bêtise, ces petites étoiles reviennent vers vous et vous infligent des dommages ! What the fuck ?!

Et que dire de la soi-disant salle bonus ? Y accéder requiert vingt-cinq pièces d'or, c'est beaucoup à l'échelle du jeu, on a de la chance si on y passe une fois au cours d'une partie. On dispose d'un court lap de temps pour crever les espèces de lanternes chinoises qui contiennent des bonus que l'on trouve partout ailleurs, les concepteurs ayant eu l'idée facétieuse de cacher des extensions de temps tout au bout de la salle. Le temps limite qui règle chaque niveau est lui aussi superflu, on a assez de mal comme ça sans devoir se presser. Tout, dans Dragon's Lair, donne l'impression d'être mal ajusté, comme une horloge montée par un fou qui donnerait toutes les heures sauf la bonne. Le personnage répond mal dans certains situations critiques comme pour s'accrocher à une corde, la plupart des phases plates-formes sont trop irritantes, celles qui ne le sont pas sont si faciles qu'on les traverse d'un trait, alors que bien entendu celles sous l'eau sont aussi exaspérantes qu'on pouvait l'imaginer.

Les poissons crachent des bulles chercheuses pour crever la vôtre, car Dirk navigue en étant recroquevillée dans une bulle d'air. Ca ressemble encore a une solution d'économie, de graphismes, d'animation, un nouveau signe de paresse de Motivetime. On doit souvent aussi manoeuvrer des barils explosifs, cette manipulation d'objets sous l'eau constitue l'une des plus grandes crétineries de gameplay du jeu, mais apparemment les auteurs ont trouvé ça tellement bons qu'ils ont décidé de l'appliquer aux mots de passe. Ils ont pris Dirk pour Ecco, le pauvre ! Allez, encore deux bêtises parmi d'autres pour finir. D'abord, les vies, quel que soit le nombre que vous en avez, il n'y en a jamais plus de trois affichées à l'écran ! On a drôlement confiance en vos capacités, il n'y a pas à dire. Restent les boss, qui sont, avec le zoom du début sur le château, le seul moment où les effets spéciaux de la console sont vraiment mis à contribution. Mais l'usage qui en est fait est tellement opportuniste, balancer et agrandir ces sprites qui bougent comme des pantins, que cela en est plus pathétique qu'impressionnant.

Dragon's Lair est un jeu terne, troué de part en part par des trouvailles calamiteuses et un maniérisme idiot, comme un chevalier tombé dans une fosse garnie de pointes. Le coup de grâce, c'est l'entrée des mots de passe qui le porte. Les auteurs ont décidé d'en faire un niveau aquatique où vous devez déposer des boules dans des emplacements précis pour entrer le code. Il y a un temps limite de 10 minutes, le plus long de tout le jeu, ce qui ne laisse rien présager de bon. Et ainsi, à chaque fois que l'on décide de reprendre une partie, il faut passer par ce supplice et perdre Dieu sait combien de temps à se démener sous l'eau à pousser des boules pour entrer un fichu mot de passe de quatre blocs de long. Ces idées imbéciles que les auteurs ont dû prendre pour des traits de génie, ajoutées à la platitude des trois misérables environnements et à une maniabilité très moyenne qui rend le jeu trop dur, suffisent à elles seules à abattre Dragon's Lair et à l'envoyer rouler dans des fonds abyssaux dont nul n'est revenu. Le dragon peut dormir en paix.

le 29 février 2008
par sanjuro



Jeu testé en version européenne
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