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TEST · REVIEW · CRITIQUECONSOLE NINTENDO ENTERTAINMENT SYSTEM (8-bit)


Il y a des coups de machette qui se perdent...

Friday the 13th

Friday the 13th

 

 NES

Développeur:
?

Editeur:
LJN
Genre:
Action / Aventure

Joueurs:
1P

Dates de sortie
02.1989 USA
trop dur Difficulté:

71%Graphismes
71%Animation
60%Son
72%Jouabilité
75%Durée de vie

63%63%

Un film d'horreur, connu pour son tueur particulièrement vicieux, sur NES ! On aura décidément tout vu sur cette console ! Surtout qu'il s'agit alors d'une série de films modernes et particulièrement dégoûtants, avec du sang, de la violence, des tripes et tout ce qu'on garde d'habitude bien enfermé à l'intérieur de soi. Et dire que des mauvaises langues accusaient les consoles Nintendo de n'accueillir que des jeux destinés aux enfants ! Clairement, ce n'est pas le public visé ici. Dites-leur que ces horribles films ont été adaptés sur NES et vous verrez leur tête ! Regardez-moi cette jaquette ! Si cela a pu avoir lieu, c'est grâce à l'éditeur défun LJN. Ce sont eux qui ont eu l'audace de... de... Oh. Je, j'ai comme une impression de déjà-vu tout d'un coup. Pas vous ? Brr, drôle de nuit.

Qu'est-ce que je disais, moi ? Je ne sais plus. Vendredi 13 s'est en tout cas retrouvé sur NES et pour une surprise, c'est une surprise. Cela ne concerne évidemment que les Etats-Unis, pas de trace du jeu en Europe, ni même au Japon, mais quand même. Pour saisir l'effronterie de cette transposition, il faut déjà connaître les films. On y suit habituellement un groupe de jeunes adultes qui va se faire décimer de façon très violente par Jason Voorhees, une brute de tueur cachée derrière un masque de hockey (Ghost Face, l'assassin de Scream, aurait notre peau pour cette généralité mais passons). Il exécute sans discrimination tous les individus qui traînent dans les parages, ayant un faible pour les empalements, les égorgements, les hachages et autres joyeusetés à l'arme blanche.

Au moment où le jeu débarque sur NES, en 1989, sept films sont déjà sortis en salle et un huitième est en route ! Mais les plus importants restent les trois premiers, qui ne sont pas si mauvais et posent les bases de la série. L'action, par exemple, se déroule presque toujours à Crystal Lake, une colonie de vacances isolée. Et comme le démontre le nombre de suites, Jason est increvable — son corps repose d'ailleurs au fond du dit lac, d'où il ressort à loisir. Les films étaient marquants pour la façon crue dont les meurtres étaient représentés, en plans rapprochés, à grand renfort d'effets spéciaux et de sang artificiel. Bien entendu, Jason est aussi l'inspiration du personnage de Rick dans la trilogie des Splatterhouse. Si les évènements n'ont rien à voir, le héros de Namco n'en est pas moins une copie conforme.

Voilà donc en gros ce qu'est Vendredi 13 et pourquoi il est si étonnant de voir ce titre polémique sur NES. La NES n'a jamais eu de vrai Splatterhouse (juste une parodie, Wanpaku Graffiti), mais même, dans Splatterhouse, Rick tue des démons, pas des gens. Sachant tout cela, ce qui surprend immédiatement passé l'écran titre est à quel point ce qu'on voit ne ressemble pas à l'idée ou l'image qu'on a des films. Avant ça, tout va bien, on a droit à un titre en lettres rouges et à une intro flash avec le couteau dans l'orbite du masque (qui est l'affiche du quatrième film). Mais une fois dans le jeu même, on se demande si on n'est pas tombé sur une cartouche chinoise piratée, parce qu'en toute franchise, ce n'est pas comme ça qu'on s'imaginait l'adaptation de Vendredi 13, même sur NES.

La campagne aux couleurs claires, les graphismes pétulants et le bonhomme en short aux articulations pliées feraient plutôt penser à un jeu de sport. Une simulation de cross-country peut-être ? Athletic World avec le Family Fun Fitness ? Non, il s'agit bien de Friday the 13th, des zombis commencent à germer. Il n'y a pas de zombis dans les films, mais au moins le lien avec les films d'horreur est fait. Ce qu'il faut toutefois noter ici, c'est qu'on parle juste de l'impression initiale. Beaucoup de testeurs américains malheureusement s'en sont tenus à elle pour porter un jugement. Les graphismes leur sont restés en travers de la gorge et leur objectivité a rendu l'âme.

Friday the 13th se présente comme un jeu d'action en vue latérale mais il est en réalité plus complexe que ça. Un plan de Crystal Lake s'affiche en appuyant sur Start et ce qu'on a sous les yeux est l'intégralité de l'aire de jeu. Tous les déplacements pourtant s'effectuent par la vue classique et le scrolling horizontal. Au lieu de posséder une liberté d'exploration bi-dimensionnel comme dans Zelda, elle est en longueur uniquement, les chemins étant ensuite connectés entre eux par des points d'accès. On serait tenté de le comparer aux Chevaliers du Zodiaque, même à Metroid et Street Gangs, mais c'est plus élaboré que ça: Crystal Lake a une véritable logique 3D. C'est une caractéristique notable du jeu, que les journalistes souvent négligent.

Il y a trois chemins principaux qui font chacun le tour d'une zone: l'un entoure les grottes, l'autre le lac, et le dernier fait toute la circonférence des lieux, bois inclus; les deux premiers y sont reliés par une ou plusieurs voies. En suivant ces chemins suffisamment longtemps, on tourne donc en rond: c'est ça, la logique 3D. Comme la visualisation est plate, cela ne va pas sans créer quelques soucis: sur le plan, les directions s'inversent selon où l'on se trouve sur le chemin. Comme beaucoup de choses dans ce jeu, une période d'apprentissage est nécessaire, pas parce qu'il est insalubrement mauvais comme certains aiment l'affirmer, mais parce qu'il est différent.

Les deux bois et les grottes sont des zones labyrinthiques. Là aussi on tourne en rond si on reste sur le même chemin, mais ni la logique, ni le plan n'y ont plus cours. Certains objets importants y sont (parfois) cachés. Le jeu contient une bonne part de hasard, nous y reviendrons. Crystal Lake est parsemé de cabanes, les plus petites sont à l'usage des moniteurs de la colo. Ce sont eux qu'on incarne, trois hommes, trois femmes, dont on peut changer à tout moment en passant par ces abris. Chacun a ses propres caractéristiques et inventaire avec une interaction minimale entre eux (soin et échange d'arme). Là où on laisse son bonhomme, on le retrouvera plus tard; c'est important pour échafauder une stratégie. A l'intérieur, on a droit à une vue de dos qui rappelle un peu la dernière mission de Rescue, mais beaucoup moins claire au vu du décor nu et de l'absence de plan. Cela demandera encore une autre période d'apprentissage.

A ce stade, vous devriez commencer à vous faire une meilleure idée de Friday the 13th. L'aventure y tient un rôle prépondérant, mais on a encore du mal à y voir un but. C'est aussi ce que ressent le joueur. Il est libre d'aller partout où il veut, marche beaucoup, ramasse aléatoirement des objets comme le briquet ou la clef, tue des zombis et des animaux sauvages à la pierre en attendant de trouver mieux, et se fait fréquemment interrompre par une alarme. Cette irritante alerte nous conduit en fait vers ce qui est à la fois le péril, le fardeau et le but du jeu: Jason Voorhees. Lorsqu'elle retentit, elle nous avertit que Jason est dans une cabane, soit avec l'un des moniteurs, soit avec les enfants, au bord du lac. Il faut vite aller leur porter secours sans quoi on risque de perdre l'un des personnages ou de faire game over, lorsqu'il ne reste plus d'enfants.

Jason fait parfois aussi des apparitions surprises sur les sentiers, et dans le lac, où il est invincible. Les combats contre lui sont difficiles. Dans les cabanes, il frappe fort et vite, et on a juste assez d'ouverture pour lui porter quatre coups. Cela lui retire un carré d'énergie, après quoi il disparaît... jusqu'à la prochaine fois, qui n'est jamais bien loin. Le but pourtant est bien de le tuer, en l'affaiblissant petit à petit à chaque rencontre. C'est une opération longue, fatigante et à rebondissements: après l'avoir finalement laissé sur le carreau, on apprend qu'il revient le lendemain, encore plus fort ! Pour en venir à bout et terminer le jeu pour de bon, il faudra tenir trois jours.

La difficulté, serrée à l'écrou, laisse infiniment peu de marge de manoeuvre. Pour progresser, il faut avoir mis tout l'apprentissage à profit et connaître le jeu par coeur pour avoir développé, plus qu'une stratégie, un vrai plan d'exécution. Le challenge a deux visages: blesser Jason sans subir trop de dégâts et parvenir à accomplir sa "quête". Un bien grand mot, mais il est impératif de réaliser certaines tâches, vaguement abordées dans le texte, pour acquérir des armes, comme la machette ou la torche, et le pull-over, qui facilitent les combats. Mais comme on est constamment interrompu par l'alarme, qui nous oblige à arrêter ce qu'on faisait pour changer de lieu, on s'embrouille et on oublie ses objectifs. Et puis, il y a le facteur aléatoire qui n'arrange rien. Tout n'est pas accessible quand on veut, il faut parfois attendre, errer, avoir de la chance.

Comme dans un bon film d'horreur, Friday the 13th a aussi son petit mystère, celui-là concernant sa création. Personne ne sait avec certitude qui a développé le jeu. Si tout, dans le style, porte à croire qu'il a été réalisé par des Japonais, on ne sait pas précisément par qui, LJN ayant pris l'habitude de cacher l'identité de ses sous-traitants asiatiques. Wikipedia dit Pack-In-Video, d'autres Atlus. On en est réduit aux conjectures, mais les noms qui reviennent le plus souvent sont ceux de compagnies ayant déjà travaillé pour Activision et Acclaim. Il y a du bon sens à choisir Pack-In-Video, les futurs auteurs, rappelons-le, d'Harvest Moon. Même si leurs thèmes semblent aux antipodes, les deux jeux ont en commun ce sens unique de la liberté et un traitement réaliste du jour.

Ce n'est évidemment pas aussi bucolique. Le graphisme n'est pas vilain, bon choix de couleurs, tracé fin, mais il est aussi méchamment dépouillé. A part dans un ou deux coins, comme la forêt de jour, il n'a pas vraiment d'âme. Jason est assez convaincant, quoique par moments il ressemble plus à un affreux de Scooby-Doo qu'à un tueur en série. Au moins, il change d'armes. Les autres sprites sont plus contestables et les protagonistes ont décidément du mal à cadrer avec le décor. Notre développeur mystère a tenté d'être fidèle aux premiers films, qui étaient un peu comme ça, avec des jeunes en short dans la forêt et au bord de l'eau, mais ils ont raté quelque chose dans le procédé, perdu la maturité des films pour quelque chose de beaucoup plus enfantin. Passons très vite sur la musique, un cauchemar de répétition. Mise bout à bout, il doit y en avoir pour à peine vingt secondes tant les pistes sont courtes.

Vendredi 13 sur NES est un jeu vraiment très spécial, finalement moins à cause de ses origines horrifiques que de son game design que l'on pourrait qualifier d'expérimental. Il n'est pas fait pour plaire à tout le monde, c'est certain; les fans de gore feront mieux de se rabattre sur n'importe lequel des trois Splatterhouse. Zzz. Le plaisir qu'on peut en tirer, une sorte d'excitation vacillante, provient des tâtonnements qu'on doit faire dans le jeu pour le comprendre et ne pas se laisser dépasser par les évènements. C'est presque un casse-tête en somme: l'amusement découle en grande partie de la compréhension du problème. Zzz, zzz...

Boîte du jeu
Version américaine



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Panorama
Tout sur une page

Le jeu est manifestement trop dur, mais ce n'est pas une nullité, juste une bizarrerie inaboutie avec quelques mérites. D'un côté, il donne un peu raison aux détracteurs de Nintendo, Vendredi 13 n'a pas pu être adapté sans être sérieusement édulcoré. Mais il reste néanmoins quelque chose du film d'horreur, quelque chose d'important: la tension. S'il n'en a pas l'allure, il en a au moins le coeur. Lorsqu'on arrive enfin à tuer Jason le premier jour, car cela au moins est faisable, on a vraiment un sentiment d'accomplissement. Là où la majorité des jeux d'action mettent un grand boss tout à la fin, Friday the 13th n'est lui en vérité qu'un immense et tortueux combat de boss qui demande toute notre concentration. Jason ne méritait pas moins.

— Et moi alors ? Bouhahahaha !
— Hein ?! Quoi !? Où suis-je ? Où est passé le site ? Oh non, Freddy Krueger !!
— Alors, on aime tester les vieilleries ? Va essayer mon jeu, tu m'en diras des nouvelles !
— C'est pas possible, je dois rêver !
— Est-ce que ça ressemble à un rêve, ça ?
SPLASH !
— Argh ! Pas les griffes dans l'estomac. Ca fait mal. Je meuuuurs.
— On perd ses réflexes ? Heureusement que je suis là pour te donner un coup de main ! Bouhahahaha !
Hé, toi qui lis ça ! Tu crois que je ne te vois pas de l'autre côté de l'écran ? Es-tu bien sûr que tu ne dors pas ? Fais attention, tu risques d'être le prochain. En attendant ma visite cette nuit, va lire le test de mon jeu, Freddy's Best Game. Fais de beaux cauchemars ! Bouhahahaha !

le 31 octobre 2012
par sanjuro



Jeu testé en version américaine


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