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TEST · REVIEW · CRITIQUECONSOLE SUPER NINTENDO (16-bit)


Un grand jeu, un formidable jeu, un... ouille, mon nez !

Pinocchio

Pinocchio

ピノキオ
 

 Super Nintendo

Développeur:
Virgin / Disney

Editeur:
Disney Interactive
Genre:
Plates-formes

Joueurs:
1P

Dates de sortie
11.1996 USA
20.12.1996 Japon
1996 Europe
facile Difficulté:

90%Graphismes
92%Animation
83%Son
75%Jouabilité
65%Durée de vie

63%63%
Trucs et astuces

50 vies:

A l'écran principal (avec le livre et Start / Options), appuyez sur B, Haut, B, B, L, Y.

Choix du niveau:

A l'écran principal, appuyez sur L, Haut, X, Haut, R, Y, Start.

Recharge d'énergie:

Mettez le jeu en pause et appuyez sur Droite, Gauche, X, X, X, Haut, Bas.

"Caro mio, replicò la Marmottina per consolarlo, che cosa ci vuoi tu fare? Oramai è destino. Oramai è scritto nei decreti della sapienza, che tutti quei ragazzi svogliati che, pigliando a noia i libri, le scuole e i maestri, passano le loro giornate in balocchi, in giochi e in divertimenti, debbano finire prima o poi col trasformarsi in tanti piccoli somari."

Pinocchio, de Carlo Collodi


Avant d'être un conte de fées satirique, Pinocchio est une fable moralisatrice sévère, un grand sermon à l'intention de tous les jeunes garçons: il faut étudier et travailler dur, prendre soin de ses parents, les distractions conduisant irrémédiablement en prison ou à l'hôpital, dixit le Criquet parlant. La morale est un peu dure, d'une dévotion trop parfaite, mais elle est aussi pleine de bons sens et certaines oreilles de délinquants auraient pu en profiter dans leur petite enfance.

Transformer le livre de Carlo Collodi en film d'animation, en "dessin animé", était déjà en soi une opération un peu profane, le message de l'auteur en étant inévitablement amolli, simplifié. Mais faire de ce film, soixante ans plus tard, un jeu vidéo, était le pire traitement que l'on pouvait infliger au livre; c'était détruire la morale pour de bon en en faisant exactement ce contre quoi celle-ci prêchait: un objet de pur divertissement. Et puis, même sans penser aux intentions originales de l'auteur, vieilles d'un siècle, l'idée de faire un jeu de cette histoire où l'action physique n'occupe qu'une faible place, où le vrai combat se livre dans la conscience du personnage, semblait parfaitement inutile.

En 1996, Disney termine de surfer sur une vague de succès de leurs films devenus des jeux vidéos, réalisés le plus souvent par Virgin en partenariat avec les animateurs du grand studio. Aladdin, Le Roi Lion, Le Livre de la Jungle, même les plus improbables comme La Belle et la Bête et Pocahontas y sont aussi passés. Aucune retenue ! Rien ne les arrête ! Si, peut-être une chose: ils créent leurs jeux plus vite que les nouveaux films ne sortent et la matière première récente a fini par manquer. Qu'à cela ne tienne, ils vont puiser dans leur histoire, offrir ce détestable rafraîchissement jeu vidéo à leurs plus anciens classiques: Pinocchio et Blanche Neige, qui sera lui adapté sur Game Boy Color par les Français d'Ubi Soft !

Et le voici donc ce Pinocchio sur Super Nintendo, fruit du travail des développeurs anglais de Virgin. Il est certes très beau, comme on était en droit de l'attendre de l'association Virgin/Disney mais aussi d'un jeu 16 bits de 1996, cependant, que vaut-il vraiment ? Dans le premier niveau, on est chargé de conduire notre joyeux pantin là où vont tous les bons garçons: à l'école. Ce n'est évidemment pas là où il finira; il sera détourné du droit chemin et du chemin scolaire, qui ne font qu'un, en rencontrant Honest John, le renard (au nom plus explicite de Grand Coquin en V.F. — adieu ironie !).

La Fée bleue, qui veille sur ce garnement de bois comme une bonne mère, a promis à Geppetto, son créateur, d'en faire un vrai petit garçon s'il parvient à mériter trois badges de vertu: vérité, bravoure et dévouement. C'est bien entendu une idée du jeu, une traduction terre à terre des aspirations du film et du livre, la quête spirituelle devenant une quête matérielle. Et vraiment, cela n'a guère d'intérêt puisque l'on reçoit automatiquement ces badges au début, au milieu et à la fin. Il semblerait que pour Virgin, les valeurs humaines dans les jeux vidéo doivent être tangibles pour contenir un fond de vérité.

La bourgade italienne qui sert de décor au premier niveau est une suite de rues reliées entre elles par des voûtes. Rien n'indiquant la fonction de ces passages, c'est un élément de gameplay dont il faut saisir le fonctionnement par soi-même. On peut aussi sauter sur les toits, monter sur les rebords des fenêtres et courir sur les murets, utiliser les leviers des fontaines comme tremplins et les panneaux indicateurs comme des canons pour se propulser dans les airs. Une variété d'actions bienvenue, tout comme les rencontres d'ailleurs: les gamins qui lancent des briques ou des balles, les oies blanches bagarreuses, les mouettes, le chat Gédéon et le renard qui tendent des pièges.

Pourtant, assez rapidement, dès que le regard est parvenu à se décrocher des personnages aux superbes mouvements dégoulinant d'animations, une sorte de léger malaise s'installe. Il y a, dans le cadre de cette ville, quelque chose de vaguement déplaisant. Peut-être est-ce parce que toutes les ouvertures ne sont que des trous sombres et que toutes les rues se ressemblent ? Ou peut-être parce qu'en dehors des ennemis, qui semblent aussi étrangers en ces lieux que Pinocchio, il n'y pas âme qui vive ? On a l'impression d'un grand vide tout proche, renforcée par ce ciel bleu-gris où se découpe le contour de maisons sans relief. C'est un peu comme si on traversait une ville fantôme, et c'est un paradoxe blessant dans un jeu où la richesse d'animations est censée apporter plus de vie que jamais. Quoiqu'avec moins d'intensité, c'est un sentiment qu'on retrouve tout au long du jeu.

Celui-ci met malgré tout beaucoup de volonté à essayer de se distinguer des autres adaptations Disney de Virgin. Outre les proportions plus larges que d'accoutumée qui lui donnent une épaisseur cinématographique, les auteurs essayent aussi de rompre la régularité des niveaux. On s'en rend bien compte dès les deux suivants. Dans le premier, on incarne, pour la seule fois de toute l'aventure, Jiminy Cricket. Perché sur un lampadaire qui éclaire à la chandelle, il doit éliminer un à un des papillons de nuit. Dans cette très jolie mais courte scène, on nous demande une fois encore de faire preuve de clairvoyance car aucune indication n'est donnée sur le but et la façon de l'atteindre (ou peut-être dans la notice mais je n'ai pas celle-ci).

Juste après ça, on se retrouve de nouveau dans la peau — c'est à dire le vernis — de Pinocchio, mais sans pour autant en reprendre tout à fait le contrôle. On est sur la scène du théâtre Stromboli et il s'agit maintenant de reproduire les gestes que nous montrent les marionnettes en appuyant sur une séquence de boutons. C'est à ce moment que l'on perd vraiment confiance dans le jeu. Faire de ce troisième niveau un mini-jeu est une erreur et un symbole. L'erreur, c'est d'empêtrer les élans du joueur dans ce gameplay lent et ennuyeux; le symbole, c'est la fracture qui va bientôt s'opérer dans le game design des jeux vidéo. Jusqu'ici, les titres Disney avaient été pour la plupart des titres d'action ou de plates-formes typiques, réalisés avec savoir-faire mais formalisme par Sega, Capcom, et Virgin. Cette cassure anodine dans le déroulement est le signe des grands changements à venir, où, pour la première fois, on commence à rejeter une structure classique et se tourner vers d'autres possibilités de jeu. Le symbole est d'autant plus fort que, pour certains joueurs, le retrogaming est de son côté un rejet de ces nouveaux types de gameplay.

Le quatrième niveau se déroule sur l'Ile des Plaisirs, un vaste parc d'attractions où les enfants ont été conduits par le cocher. Enfin, pas si vaste: des grandes roues pour décor, des ballons au bout desquels on s'accroche comme dans Tiny Toon ou Cool Spot, tout cela assez vite traversé en suivant Lampwick (Crapule en V.F. — quel prosaïsme !) qui nous arrose de pétards, puis place à des montagnes russes comme dans Aero the Acro-Bat. Oui, encore un "comme" et ce ne sera pas le dernier. A bord du chariot, il faut se baisser ou sauter selon les indications et cela peut vite devenir agaçant. Tout ça n'est guère original, pas plus que le niveau suivant, mais lui est nettement plus agréable à jouer. On escalade une montagne sur fond de pleine lune, dirigeant un Pinocchio transformé, désormais à moitié âne mais disposant aussi d'une attaque, ce qui n'était pas le cas jusqu'ici n'ayant au fond aucune raison de se défendre.

Il doit faire en particulier attention à des créatures d'ombre très bien faites, présentes aussi dans le film, qui envoient rouler le pantin d'une grande claque sur les fesses. Au sommet, Pinocchio rend justice aux ânons en punissant l'affreux cocher, après quoi il effectue un grand plongeon en direction des fonds sous-marins du niveau suivant. Tout ce parcours rappelle furieusement un passage similaire, la fin du niveau 3 dans Pocahontas. Le niveau aquatique est un autre niveau bien fait, toujours dans un esprit traditionnel. Les raies font office de plates-formes et l'on marche la tête à l'envers, se remplissant les poches de coquillages pour redescendre. Le lionfish envoie Pinocchio culbuter avec son rugissement et la murène l'électrocute, tandis qu'il se sert des anémones de mer comme les ressorts de Sonic, mais des ressorts vivants.

Les trois dernières scènes ont pour sujet Monstro, l'énorme baleine qui dans le livre est un requin sans nom et dans le film plutôt un hommage à Moby Dick. On nage d'abord parmi un banc de thons, s'agrippant à leur queue pour résister au courant. Il faut tenir quelque temps avant de se laisser candidement avaler par Monstro. A l'intérieur du cétacé, il y a l'épave d'un navire qui tient lieu d'avant-dernier niveau. Il est truffé de plates-formes avec quelques crabes pour faire bonne mesure. Pour s'en échapper, il faut ramasser du bois pour allumer un feu puis rejoindre Geppetto en vue de l'éternuement escompté. Et finalement, poursuivi par la baleine, le jeu se termine par une course d'obstacles en radeau où l'on doit se baisser et sauter par dessus des récifs. Par rapport au reste, c'est une conclusion éprouvante, où, en un rien de temps, on peut y perdre toutes ses vies et ses continus.

Avec le chariot, ce sont les deux seules occasions que le jeu a d'être difficile et il ne les rate pas ! Le reste du temps, Pinocchio est d'une facilité déconcertante grâce à cette barre de vie inusable, capable de recevoir 20 coups et symbolisée adéquatement par une baguette de fée. Autant dire qu'à aucun moment les ennemis ne sont à craindre; la défaite vient uniquement des chutes, seules capables de retirer immédiatement une vie. Si les trois modes de difficulté apportent du changement, ils ne permettent quand même pas de corriger des erreurs fondamentales telles que celle-ci.

Le point fort de l'action dans Pinocchio sur Super Nintendo, c'est sa variété, son point faible, c'est la qualité de cette variété. Car le meilleur compliment qu'on puisse faire aux niveaux plates-formes finalement, c'est d'être assez traditionnels. Quant à la réussite visuelle que constitue cette nouvelle entreprise Virgin, si elle est bien réelle, ses limites le sont aussi. C'est ce vide déjà évoqué et qu'on peut préciser techniquement: fonds uniformes, absence d'éléments décoratifs animés, étroitesse de la résolution (inférieure comme souvent à la version Mega Drive et ici, à cause de la taille des sprites, cela a des conséquences), aucune cinématique, remplacées par ce livre trop commode qui narre l'histoire sans nous laisser bien voir des personnages secondaires importants comme le chat Figaro et Cleo, le poisson.

Ce Pinocchio en bois de pin numérique a tout de même une qualité indéniable qui montre bien quel public est visé: il est d'une extrême fidélité au film, ne prend pour ainsi dire aucune liberté avec lui. Les scènes suivent le déroulement du scénario, on retrouve les traits et les expressions de chaque personnage ainsi que les airs des fabuleuses chansons telles que When You Wish Upon a Star, Little Wooden Head et Give a Little Whistle (Quand on prie la bonne étoile, Un pantin de bois et Sifflez vite, vite !) très peu remaniés par Allister Brimble (déjà entendu dans Le Cobaye). Ce que le jeu vidéo fait le mieux est de souligner le génie du long métrage; un joli faire-valoir qui n'aura malheureusement que peu d'intérêt pour le joueur ordinaire.

— Povero Pinocchio ! Mi fai proprio compassione !...
— Perché ti faccio compassione ?
— Perché sei un burattino e, quel che è peggio, perché hai la testa di legno."



le 10 avril 2009
par sanjuro



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